JulienFalgas

joined 1 year ago
[–] JulienFalgas 7 points 2 days ago* (last edited 2 days ago)

Texte intégral :

Le rapport sur la compétitivité et l'avenir de l'Europe remis par Mario Draghi à la Commission européenne le 9 septembre a eu le grand mérite de remettre en cause le dogme de l'austérité budgétaire et de souligner l’importance de la recherche, de l’innovation et de la formation pour juguler le décrochage économique, scientifique et technique de l’Europe et retrouver des perspectives florissantes. Pour autant, si ce rapport propose avec raison d’investir dans la formation, la santé, l’isolation thermique des bâtiments, les énergies décarbonées ou les grandes infrastructures de transports, il demeure attaché à une conception de la recherche et de l’Université frappée d’obsolescence, fondée sur la croyance économiciste en un marché total des chercheurs et des établissements.

Dans notre contexte de longue dépression économique, couplée aux crises climatique, démocratique, sanitaire et sociale, il importe de tirer le bilan des politiques publiques suivies en France depuis 20 ans en matière de formation et de recherche fondamentale et appliquée. Le Crédit d’Impôt Recherche (CIR) est une niche fiscale qui permet aux entreprises de déduire de leur impôt sur les sociétés 30% de dépenses qu’elles font apparaître dans leur bilan comme procédant de “recherche et développement” (R&D). En l’absence de contrôles sérieux et critériés, de multiples officines se sont spécialisées dans le maquillage de dépenses génériques en R&D et de cadres commerciaux en chercheurs et ingénieurs. Si le CIR a un effet très positif pour les microentreprises et les PME qui emploient des ingénieurs-chercheurs pour concevoir et produire de la haute technologie qui dispose de marchés de niche, il a toutefois un effet largement négatif sur la R&D des moyennes et grandes entreprises. Les rapports de l’OCDE, de la Cour des Comptes ou de France Stratégie ont montré que le CIR est avant tout un contournement des règlements européens sur les aides directes aux entreprises et n’a aucun effet ni sur l’emploi ni sur l’investissement en R&D. Les effets indirects sont en réalité bien pires, puisque en privant de financement la recherche publique et l’Université, le CIR détériore l’écosystème français de recherche et de formation. Si les entreprises continuent de délocaliser leur R&D en Asie du sud-est et, dans une moindre mesure, aux USA, c’est pour la qualité de leur écosystème et la dégradation du nôtre. Le décrochage du niveau scientifique et technique en France est alarmant, et le manque de culture scientifique de la classe politique en est le reflet. Les désastreuses réformes du lycée comme l'absence de politique ambitieuse de recrutement et formation des enseignants ont encore accéléré la débâcle.

Comment en sommes-nous arrivés là ? L’enseignement supérieur et la recherche ont connu deux décennies d’incessantes réformes structurelles théorisées par le rapport “Education et croissance” de MM. Aghion et Cohen, paru en 2004. Il reposait sur quelques postulats: (i) les financements de l’Université et de la recherche doivent êtres concentrés sur quelques établissements, qui ont vocation à assurer l’activité de recherche et donc d’innovation ; les autres, paupérisés, doivent graduellement être transformés en collèges universitaires en grande partie financés par des frais d’inscription dérégulés ; (ii) les universitaires et chercheurs doivent être mis en concurrence pour obtenir les budgets nécessaires à l’exercice de leur métier ; (iii) l’Etat doit accompagner l’essor d’un enseignement supérieur privé lucratif. Ce dernier volet a parfaitement réussi. Les moyens qui manquent au service public se retrouvent par exemple dans les 25 milliards € consacrés en pure perte à l’apprentissage et à l’alternance et captés par un secteur privé de piètre qualité. Pour le reste, ces croyances infondées ont engendré bureaucratisation, paupérisation, précarisation et participé au décrochage pointé par le rapport Draghi. Il en résulte une perte de sens pour l’Université, conçue pour produire, transmettre, conserver et critiquer les savoirs, et réformée au prétexte de produire de la croissance économique — avec un résultat à l’exact opposé des promesses de prospérité.

Concevoir un système d’Université et de recherche conforme aux défis du XXIème siècle suppose de se projeter à 10 ou 20 ans, dans une société profondément transformée, qui aurait triomphé des crises qui la frappent et qui ait retrouvé vitalité, espoir et envie d’ouvrir des horizons communs désirables.

  • Dépasser la crise politique et instituer une démocratie effective suppose une formation à la citoyenneté permettant de faire vivre un espace public de pensée, de critique réciproque et de délibération. A quelles connaissances, y compris pratiques et techniques, voulons nous que l'École forme pour ce faire ?
  • Surmonter la crise sociale nécessite de traduire les valeurs de la République — liberté, égalité, fraternité — en services publics d’éducation, de santé, de transports, de justice.
  • Juguler les crises climatique et environnementale suppose d’organiser une production agricole, énergétique et industrielle locale, conforme aux besoins de la population. Ce nouvel aménagement du territoire implique un besoin massif de formation et de recherche mais aussi une organisation de l’Université et de la recherche en réseau, qui innerve le territoire.

Plafonner le CIR et le conditionner à l’emploi de docteurs en CDI et au paiement de l’impôt sur les sociétés — que moins d’un tiers des entreprises de recherche paient à ce jour — permettrait de financer en grande partie cette politique d’avenir.

Nous projeter dans un avenir meilleur suppose d’une part de comprendre le monde au plus juste et au plus vrai et d’autre part de témoigner d’une attention et d’une confiance dans la jeunesse qui passent par sa formation intellectuelle et pratique et par les conditions matérielles de son émancipation. Mener une politique d’austérité pour l’Université et la recherche serait priver la société d’avenir.---

 

Un collectif de plus de deux mille universitaires et chercheurs dénonce, dans une tribune au « Monde », deux décennies d’errance dans l’enseignement supérieur et la recherche, qui ont conduit à un décrochage économique, scientifique et technique de la France.

[–] JulienFalgas 2 points 5 days ago

Extrait :

Interrogé sur son outil préféré dans le domaine de l’IA, Hinton a dit qu’il était un fervent utilisateur de ChatGPT, tout en admettant qu’il était préoccupé par les répercussions de cette technologie.

« Dans les mêmes circonstances, je referais la même chose (sa recherche, NDLR). Mais je crains que la conséquence globale de tout cela ne soit des systèmes plus intelligents que nous qui finissent par prendre le contrôle », a ajouté le chercheur.

Grâce à leurs travaux, l’humanité a maintenant un nouvel instrument dans sa boîte à outils, « que nous pouvons choisir d’utiliser à de bonnes fins », a souligné le comité.

La manière dont ces travaux seront utilisés à l’avenir dépendra « de la manière dont nous, les humains, choisirons d’utiliser ces outils incroyablement puissants, déjà présents dans de nombreux aspects de nos vies ».

Décernés depuis 1901, les prix Nobel distinguent les personnes qui ont œuvré pour « le bienfait de l’humanité », conformément au vœu de leur créateur, l’inventeur suédois Alfred Nobel.

Quand un père des IA génératives et le comité du Nobel pataugent en plein impensé numérique : peurs irrationnelles, promesses de bienfaits hypothétiques, prophéties autoréalisatrices. Ou comment affirmer "en creux" la puissance des techniques, tout en empêchant toute discussion politique sur les valeurs et les objectifs qui les portent.

Tant que l'on développera des techniques sans les adosser à des connaissances quant à leur place et leur impact dans les sociétés, on ne devrait pas parler de technologie.

[–] JulienFalgas 8 points 1 week ago (1 children)

L'état des lieux est assez juste, mais je déplore également le ton décliniste de l'article.

C'est comme les articles sur les catastrophes climatiques qui ne rappellent pas que des perspectives existent et qu'il est urgent d'agir.

Ce type de papier attise le désespoir :

  • désespérant pour les personnes qui n'y connaissent pas grand chose parce qu'elles ne voient pas comment faire autrement que continuer comme avant,
  • désespérant pour les personnes qui se démènent pour que ça change, à qui on semble dire que c'est peine perdue et que cela ne vaut même pas la peine de parler d'elles.
 

Morgane Tual : Après vingt ans de domination des grands réseaux sociaux, nos usages du Web ont changé. Les internautes se réfugient dans des cocons privés, reléguant les grandes plateformes à des lieux de divertissement plus que de conversation, où peine à subsister une culture commune.

[–] JulienFalgas 1 points 1 week ago

J'approuve à 100% ton analyse !

[–] JulienFalgas 2 points 1 week ago (1 children)

Tournesol est une excellente initiative !

Mais force est de constater que :

  • Les règles du jeu actuelles font la part belle aux grandes plateformes extractivistes, dont le modèle économique reste florissant tandis que les initiatives comme Tournesol doivent bidouiller et dépendent des dons pour trouver les moyens de subsister.
  • Le soutien institutionnel reste très modeste : il suffit de constater combien de nos institutions continuent d'afficher fièrement les petits logos des grandes plateformes sur leurs supports de communication (cela m'a toujours fait penser aux pastilles "vu à la télé" des catalogues de mon enfance).
[–] JulienFalgas 3 points 1 week ago (3 children)

Que faire en attendant un hypothétique dégroupage des réseaux sociaux ?

Le Conseil National du Numerique (CNNum) défend l'idée que la recommandation algorithmique (aujourd'hui dictée par les plateformes elles-mêmes) soit ouverte à d'autres acteurs, dans l'espoir que la concurrence tire la qualité vers le haut.

Problème : Maria Luisa Stasi observe « il est également possible que les nouveaux fournisseurs de services de recommandation de contenus se contentent de reproduire le même modèle économique des grandes plateformes de réseaux sociaux, au lieu de promouvoir des modèles diversifiés, innovants et plus respectueux des droits humains. »

Selon elle, 3 facteurs pourraient « fortement minimiser ce risque » :

  1. Fixer des règles du jeu claires pour tous les acteurs, ce qui découragerait les modèles extractifs et encouragerait la diversité.
  2. Faciliter et soutenir les initiatives émanant de la société civile, du monde universitaire ou d’autres acteurs à but non lucratif.
  3. Soutenir l’adoption de systèmes de recommandation de contenus alternatifs et orientés vers l’intérêt public.

Ne faudrait-il pas commencer par là ? Sans attendre une hypothétique obligation d’ouverture à l’interopérabilité qui mettra des années à se concrétiser…

En l’état actuel des choses :

  1. Les règles du jeu permettent à des services délétères de prospérer sur la captation d’attention et de données.
  2. Le soutien aux initiatives de la société civile ou du monde universitaire est quasi-nul dans un environnement où tous les efforts sont concentrés sur le modèle "startup", les objectifs de rentabilité et de croissance rapide.
  3. On ne peut pas parler de soutien à l’adoption d’alternatives alors que nos politiques et nos institutions s’ingénient à communiquer en priorité via les grandes plateformes incriminées, légitimant ainsi leur position dominante.

Alors, on commence par où ?

[–] JulienFalgas 1 points 1 week ago (2 children)

La publicité (et les annonceurs) a toujours été exclue du projet : l'idée de Needle n'aurait jamais germé sans cela.

Par bénéficiaire, j'entends les utilisateurs, les citoyens, les collectifs, les organisations... Mais pour l'heure, ce sont surtout de gentils cobayes qui essuient les plâtres avec nous, car fabriquer quelque-chose de vraiment nouveau demande beaucoup de patience et d'abnégation.

Tu as raison, le site de Profluens fait très "startup nation" et je comprends qu'il puisse faire un peu peur. Ça fait partie des mauvaises idées induites par le cheminement auquel on nous pousse dans le monde académique dès que l'on veut sortir du labo. Pour sortir de ce modèle, j'adhère complètement à l'idée d'archipels et je te rejoins sur Framasoft. Modulo la lourde tâche de nouer et faire vivre tous ces liens.

Je suis convaincu que Needle a des applications naturelles pour mettre en valeur les publications scientifiques qui le méritent vraiment et outiller notre sérendipité. Mais être chercheur ne suffit pas (nul n'est prophète en son pays). Peut être même au contraire : la fascination pour "le privé" est encore forte et on a bien du mal à appliquer ce qu'on professe. Il n'y a qu'à voir la faible part de PhD parmi les "ingénieurs de recherche" qui dirigent nos services universitaires, alors que l'on clame haut et fort que le doctorat est gage de solides compétences professionnelles. Ajoute à cela des jeux de pouvoirs multidimensionnels (l'université de l'invisible de Terry Pratchet est assez fidèle à la réalité) et tu comprendras que faire émerger une projet par des universitaires pour des universitaires est une vraie gageure.

Une piste en réflexion actuellement serait de co-construire quelque chose avec des associations d'anciens. Needle pourrait en effet avoir des applications immédiates pour rapprocher les membres de ces collectifs qui - sans le avoir - se croisent sans doute sur pas mal d'information ou de ressources professionnelles. L'avantage étant que chacun ancien est un relai potentiel d'autres organisations (son employeur et/ou ses assos).

[–] JulienFalgas 2 points 1 week ago (10 children)

Ce passage me parait important :

Si comme le suggère le dernier rapport du Forum économique mondial sur les risques globaux, la désinformation est l’une des plus grandes menaces à court terme pour l’humanité, notre capacité collective à comprendre comment elle se propage et son impact sur notre société doit être une priorité.

Il ne nous viendrait pas à l’idée d’entraver la recherche scientifique sur la propagation des virus, ou sur l’impact du réchauffement climatique sur l’environnement. De la même manière, la recherche sur la désinformation doit pouvoir être menée sans encombre, et avec l’accès aux informations nécessaires pour en saisir la complexité. La compréhension des ressorts économiques, politiques et technologiques de la désinformation est une question de santé publique, de résilience démocratique et de sécurité nationale.

Nous sommes au stade où la société civile n'a pas encore pris conscience du fait que sans un écosystème info-communicationnel sain, nous n'avons aucune chance de faire émerger des réponses concertées face aux grands défis (climat, santé, biodiversité, démocratie, etc). Pire : nous n'en sommes même pas au stade où l'on se préoccupe de préserver nos capacité d'analyse face à ce problème. Comme si le GIEC n'en était qu'à ses balbutiements.

Mais je te rejoins sur le caractère incantatoire de cet appel (dont je suis signataire). Parallèlement à l'action à grande échelle, nous avons besoin de cultiver des alternatives, des démonstrations qu'un autre accès à l'information est possible. Ce à quoi je m'emploies avec needle.social (dont nous avons discuté un peu il y a quelques jours ici).

 

À l’occasion de la Journée internationale de l’accès universel à l’information, l’Observatoire international du Forum sur l'Information et la Démocratie publie un appel de 150 chercheurs issus de 41 pays pour alerter contre les menaces et pressions croissantes auxquels sont confrontés ceux qui étudient la désinformation.

Nous exhortons les gouvernements à créer un cadre qui garantisse une recherche sûre, indépendante et accessible sur les causes profondes et les menaces que la désinformation fait peser sur nos démocraties.

[–] JulienFalgas 1 points 2 weeks ago (1 children)

Je suis à Metz (Moselle, Grand-Est), et c'est vrai que la proximité géographique est une gageure supplémentaire !

[–] JulienFalgas 2 points 2 weeks ago

En simple joueur (mais de très longue date), cela fait quelques temps maintenant que je me désole de cette fuite en avant dans la surproduction. Un peu comme partout ailleurs, le niveau d'ensemble atteint un palier en termes de qualité d'édition mais au détriment de la personnalité des jeux, de leur "sincérité" pour exprimer quelque chose de leurs auteurs. Devant ce flot de productions léchées et bien marketées, on peine à faire l'effort de donner sa chance à des propositions un peu plus rugueuses, d'autant qu'elles sont de plus en plus difficiles à dénicher.

Avec l'avancée en âge et le temps disponible qui devient une denrée rare, j'ai autre chose à faire qu'écumer les forums pour faire le tri. Or, les outils plus immédiats sont insuffisants : une note moyenne sur boardgamegeek ne me dit rien des jeux qui pourraient sortir à mes yeux de l'ordinaire. On peut avoir une moyenne élevée sur un jeu qui n'aura su convaincre durablement (10/10) personne, et à l'inverse avoir un jeu très clivant qui tombera dans les limbes de l'oubli alors que pour certaines personnes il fait figure de must.

 

Suite à un échange avec @[email protected] dans la foulée d'un post de @[email protected], je me dis que ce retour d'expérience peut intéresser quelques personnes ici.

Je suis enseignant-chercheur en Sciences de l'Information et de la Communication. De mars 2023 et jusqu'à début mai 2024, j'ai présidé une startup issue de mes recherches (Profluens), afin de pérenniser un projet qui m'occupe de longue date (Needle.social). De cette expérience, je retiens 2 ou 3 choses que j'aimerais partager avec vous.

L'idée de Needle a germé fin 2015

  • 6 mois avant que n'éclate le scandale Cambridge Analytica,
  • 2 ans avant que Donald Trump ne popularise l'expression de "fake news".

Déjà, j'étais préoccupé par l'évolution de notre environnement médiatique face à la montée en puissance des réseaux sociaux. C'est pourquoi j'ai imaginé une autre manière de partager et de faire circuler des informations et des contenus. Autant dire qu'il n'y avait ni débouché économique, ni même de demande sociétale pour cette invention qui fait le pari de ne pas capter notre attention.

Ce "carnet" répertorie les temps fort du projet Needle.

Que retenir de mon année comme PDG d'une startup ?

Pour moi, créer une entreprise n'a jamais été une fin. Avec le temps, je me suis tourné vers ce véhicule économique faute d'autre option pour faire sortir mon invention du labo.

Ce que je sais aujourd'hui :

  • Mon invention n'avait pas atteint une maturité suffisante lorsque nous avons créé Profluens en mars 2023. Créer une entreprise était pourtant la seule piste disponible pour poursuivre les développements initiés avec les moyens du bord au Centre de recherche sur les médiations. En effet, comme la plupart des laboratoires de sciences humaines et sociales, mon unité de recherche ne dispose pas de postes pérennes en ingénierie logicielle.
  • Needle représente un défi technique sous son apparente simplicité. Il ne s'agit pas seulement d'assembler des briques existantes pour bricoler une expérience utilisateur différente. Il s'agit de développer une technologie selon un paradigme tout à fait différent de celui qui préside aux plateformes qui dominent nos pratiques médiatiques contemporaines.
  • La réussite de Needle dépend de la poursuite patiente et sincère de nos efforts pour susciter la découverte des contenus qui le méritent. Je reste convaincu que la réponse aux grands défis collectifs (environnement, santé, éducation, démocratie...) réside dans notre capacité à imaginer des réponses aussi riches et variées que les informations, les créations et les idées qui nous rassemblent.
  • Il est indispensable d'associer les bénéficiaires de Needle aux décisions qui les concernent. En effet, tout repose sur la dissémination d'un service gratuit digne de confiance. C'est un vaste chantier qui reste à entreprendre et qui ne doit pas reposer sur les seule épaules d'une entreprise privée quelle qu'elle soit.

Et maintenant ?

Afin de préserver les finances de Profluens, je suis revenu à mes fonctions d'enseignant-chercheur à l'Université de Lorraine. Dans le cadre d'une autorisation de concours scientifique, je continue d'apporter mes conseils à Profluens quant à l'évolution de Needle et aux enjeux info-communicationnels qu'implique le projet. Toujours concentré sur les développements informatiques, c'est le directeur technique qui a pris le flambeau en tant que Président.

Autant dire que nous rêverions d'être rejoints par une personne plus compétente que nous pour piloter la restructuration et l'animation du projet sous forme d'une société coopérative. En attendant, les développements se poursuivent pour parvenir à une version pleinement fonctionnelle et décentralisée qui pourra (enfin) faire l'objet d'une publication open source.

[–] JulienFalgas 1 points 2 weeks ago (3 children)

Oui, comme beaucoup je connais les CHATONS et Framasoft de l'extérieur, mais je n'ai pas de contact à ce stade et je sais qu'ils ont déjà fort à faire avec leurs propres projets.

De notre côté, nous sommes face à un défi de restructuration et de remise à plat du "modèle économique" (pour employer des gros mots) : avoir une âme libriste est nécessaire, mais pas suffisant. Ce qu'il nous manque, c'est un.e libriste avec de solides compétences en entrepreneuriat social et solidaire / coopératif.

[–] JulienFalgas 3 points 3 weeks ago (6 children)

Maria Luisa Stasi observe à la fin :

Il est également possible que les nouveaux fournisseurs de services de recommandation de contenus se contentent de reproduire le même modèle économique des grandes plateformes de réseaux sociaux, au lieu de promouvoir des modèles diversifiés, innovants et plus respectueux des droits humains. Trois facteurs pourraient fortement minimiser ce risque. Premièrement, les régulateurs pourraient fixer des règles du jeu claires pour tous les acteurs, ce qui découragerait les modèles extractifs et encouragerait la diversité. Deuxièmement, les gouvernements pourraient faciliter et soutenir les initiatives émanant de la société civile, du monde universitaire ou d'autres acteurs à but non lucratif, ce qui pourrait aboutir à la création de systèmes davantage axés sur l'intérêt public. Troisièmement, les gouvernements et les régulateurs pourraient adopter des politiques qui soutiennent l'adoption de systèmes de recommandation de contenus alternatifs et orientés vers l'intérêt public.

Ne faudrait-il pas commencer par là ? Sans attendre une hypothétique obligation d'ouverture à l'interopérabilité qui mettra des années à se concrétiser...

En l'état actuel des choses :

  • Les règles du jeu permettent à des services délétères de prospérer sur la captation d'attention et de données : pas besoin de dégrouper pour durcir les règles.
  • Le soutien aux initiatives de la société civile ou du monde universitaire est quasi-nul. J'en sais quelque-chose pour m'échiner depuis fin 2015 à concrétiser un projet d'alternative depuis un laboratoire universitaire. L'accompagnement est concentré sur la valorisation économique en mode "startup", avec en priorité des objectifs de rentabilité et de croissance rapide. D'ailleurs, si vous connaissez des gens compétents dans le montage de projets coopératifs et motivés par l'idée qu'un autre numérique est possible, je suis preneur.
  • Enfin, on ne peut pas parler de soutien à l'adoption d'alternatives alors que nos politiques et nos institutions s'ingénient à communiquer en priorité via les grandes plateformes incriminées, légitimant ainsi leur position dominante.
 

J'ai une affection particulière pour ce petit monde de la bande dessinée qui souffre de longue date de précarisation et de paupérisation de ses auteurs et (davantage encore) autrices.

Sans elles, sans eux, nos imaginaires seraient encore plus étiolés. La bande dessinée est un des rares modes d'expression individuelle qui permette de développer des univers et des récits à même de rivaliser avec les productions formatées des mastodontes de l'audiovisuel.

Je ne peux que vous engager à entendre leur appel.

 

Si le RN reste malgré tout en tête dans 55 % des circonscriptions et semble bien placé pour remporter les élections législatives qui se profilent, c’est sans compter sur le fait que les résultats électoraux sont le reflet de dynamiques politiques et sociales et non un simple bilan comptable.

Aussi proposons-nous une variante de la carte précédente où nous représentons en jaune les circonscriptions dans lesquelles l’écart de voix entre le NFP et son principal adversaire est de moins de 5 %. En d’autres termes, les circonscriptions électorales où rien n’est joué.

Dans cette configuration, 18 % des circonscriptions semblent très indécises et le RN ne semble plus en position de force que dans 45 % des cas – ce qui est déjà beaucoup trop. Rien n’est cependant joué.

 

publication croisée depuis : https://lemmy.world/post/13074836

XR France à propos de ses choix en matière d'outils numériques :

Utiliser les GAFAM ou des logiciels propriétaires dans nos luttes, c’est se déposséder de nos outils de lutte. Être soumis à des outils qui ne visent pas le succès de nos luttes, mais leur rentabilité.

Les solutions des GAFAM ne sont meilleures que tant qu'on les prend comme référence :

Il ne faut pas chercher un logiciel libre comme une alternative à un logiciel propriétaire, mais plutôt chercher un logiciel libre pour répondre à un besoin.

Là où le bât blesse, c'est lorsqu'il s'agit de médiatiser :

Réseaux sociaux : On reste chez les GAFAM car c’est essentiel pour notre audience.

Comment en sortir ?

 

XR France à propos de ses choix en matière d'outils numériques :

Utiliser les GAFAM ou des logiciels propriétaires dans nos luttes, c’est se déposséder de nos outils de lutte. Être soumis à des outils qui ne visent pas le succès de nos luttes, mais leur rentabilité.

Les solutions des GAFAM ne sont meilleures que tant qu'on les prend comme référence :

Il ne faut pas chercher un logiciel libre comme une alternative à un logiciel propriétaire, mais plutôt chercher un logiciel libre pour répondre à un besoin.

Là où le bât blesse, c'est lorsqu'il s'agit de médiatiser :

Réseaux sociaux : On reste chez les GAFAM car c’est essentiel pour notre audience.

Comment en sortir ?

 

publication croisée depuis : https://lemmy.world/post/11075122

Émission de Xavier de la Porte, autour de la thèse de sociologie de Camille Girard-Chanudet.

Passionnante plongée dans le quotidien d'une équipe d'annotatrices pour entrainer un algorithme d'anonymisation de décisions de justice :

On perçoit à quel point les catégories d'annotation pèsent lourd, et combien il est crucial que l'annotation humaine se place dans une perspective d'intelligence collective.

Derrière un imaginaire peuplé d’androïdes rutilantes se cachent les petites mains qui annotent patiemment les données. Un travail sans fin, car le réel sans cesse changeant échappe à l'automatisation.

La thèse de sociologie de Camille Girard-Chanudet éclaire les rouages du deep learning : au palais de justices, des travailleuses de catégorie C travaillent avec application à annoter les données pour un algorithme d'anonymisation des décisions de justice destinées (entre autres) aux startups des legal techs.

L'émission de Xavier de La Porte révèle l'ampleur des collaborations humaines encapsulées dans les machines que l'on voudrait nous présenter comme intelligentes. C'est une myriade de décisions qui conduisent à définir des catégories réductrices pour saisir le réel. Ces catégories s'imposent silencieusement - d'abord aux travailleuses et travailleurs du clics, puis aux utilisatrices et utilisateurs des services d'IA.

Toutefois, à la différence de la majeure partie du "digital labor" étudié par Antonio A. Casilli et ses collègues du programme Panoptiwork, cet exemple démontre qu'il est possible de mobiliser l'IA dans une perspective d'intelligence collective.

L'intelligence collective, c'est "la mise en commun de la réflexivité afin de finaliser une action qui ne pourrait pas l'être par une seule personne" (Samuel Szoniecky et Nasreddine Bouhaï). Cette mise en commun n'est possible qu'au prix de contraintes destinées à rendre le travail interopérable. Ainsi, l'activité des annotatrices du Palais de Justice est cadrée par des catégories, mais leur position pérenne leur permet d'interroger et de faire évoluer ces catégories.

Les grands modèles de NLP sur lesquels s'appuient de telles applications restent ceux que des entreprises privées daignent partager en open source. Ils ne sont pas entrainés dans des conditions aussi idylliques, loin de là. Est-ce tolérable ?

 

Émission de Xavier de la Porte, autour de la thèse de sociologie de Camille Girard-Chanudet.

Passionnante plongée dans le quotidien d'une équipe d'annotatrices pour entrainer un algorithme d'anonymisation de décisions de justice :

On perçoit à quel point les catégories d'annotation pèsent lourd, et combien il est crucial que l'annotation humaine se place dans une perspective d'intelligence collective.

Derrière un imaginaire peuplé d’androïdes rutilantes se cachent les petites mains qui annotent patiemment les données. Un travail sans fin, car le réel sans cesse changeant échappe à l'automatisation.

La thèse de sociologie de Camille Girard-Chanudet éclaire les rouages du deep learning : au palais de justices, des travailleuses de catégorie C travaillent avec application à annoter les données pour un algorithme d'anonymisation des décisions de justice destinées (entre autres) aux startups des legal techs.

L'émission de Xavier de La Porte révèle l'ampleur des collaborations humaines encapsulées dans les machines que l'on voudrait nous présenter comme intelligentes. C'est une myriade de décisions qui conduisent à définir des catégories réductrices pour saisir le réel. Ces catégories s'imposent silencieusement - d'abord aux travailleuses et travailleurs du clics, puis aux utilisatrices et utilisateurs des services d'IA.

Toutefois, à la différence de la majeure partie du "digital labor" étudié par Antonio A. Casilli et ses collègues du programme Panoptiwork, cet exemple démontre qu'il est possible de mobiliser l'IA dans une perspective d'intelligence collective.

L'intelligence collective, c'est "la mise en commun de la réflexivité afin de finaliser une action qui ne pourrait pas l'être par une seule personne" (Samuel Szoniecky et Nasreddine Bouhaï). Cette mise en commun n'est possible qu'au prix de contraintes destinées à rendre le travail interopérable. Ainsi, l'activité des annotatrices du Palais de Justice est cadrée par des catégories, mais leur position pérenne leur permet d'interroger et de faire évoluer ces catégories.

Les grands modèles de NLP sur lesquels s'appuient de telles applications restent ceux que des entreprises privées daignent partager en open source. Ils ne sont pas entrainés dans des conditions aussi idylliques, loin de là. Est-ce tolérable ?

 

L'article suggère que le modèle d'abonnement illimité à un titre de presse atteint ses limites à cause de la surcharge informationnelle. Il y aurait un paradoxe à baser l'offre de presse sur l'accès illimité alors que nous souffrons d'infobésité.

Je pense également que choisir un unique titre de presse auquel s'abonner va à l'encontre d'une idée bien ancrée dans les esprits : pour être bien informé, il faut croiser ses sources.

Le gros consommateur d'information s'abonne et soutient un titre d'élection. Mais il recoupe aussi ses informations avec des émissions de radio, des revues long format, etc. Le public CSP+ bénéficie bien souvent de l'accès à une base de presse dans le cadre professionnel. Les retraités ont le temps de profiter des offres des médiathèques.

Pour le grand public qu'évoque l'article de Maxime Loisel, l'exigence de recouper son information se traduit par une forme de paralysie. Afin de ne pas être victime du point de vue unique d'un titre que l'on ne fera que survoler, le réflexe consiste à s'en remettre à l'information partagée sur les réseaux sociaux - en complément du journal télévisé. En plus d'être gratuite et exposée sous une forme addictive, l'info des réseaux sociaux est adressée par l'entourage.

Dans le même mouvement, toute une frange de la population se retrouve à la merci des choix éditoriaux d'algorithmes conçus pour maximiser l'engagement et le recueil de données sans aucune considération pour la pertinence ou même la véracité.

C'est pourquoi il me semble qu'un format mono-éditeur plus digeste tel que le propose Maxime Loisel (à l'image de La Matinale Le Monde) ne suffira pas à réconcilier le grand public avec l'abonnement de presse. Trop inquiets de partager leurs audiences, les éditeurs de presse scient la branche sur laquelle ils sont assises : maintenir son lectorat derrière un mur d'abonnement est antithétique avec la prétention à l'informer.

Le projet Needle (né à l'Université de Lorraine et que je porte aujourd'hui via Profluens) part de la conviction que nous avons besoin d'inventer d'autres manières l'accéder et de partager de l'information. S'agissant de l'info en ligne, toute la question est de savoir comment lui faire bénéficier de cette innovation, presque "malgré elle".

Et si le lectorat s'attachait d'autant plus à son média d'élection, que ce dernier sait l'ouvrir à d'autres horizons, y compris en dehors de ses propres colonnes ?

 

Utiliser un réseau social public, indépendant et dont les algorithmes seraient définis selon des règles éthiques de haut niveau qui ferait circuler l’information tout en versant des redevances à tous les médias ?

50% des adultes québecois sont partants d'après une étude de l'Université de Laval.

Cette proportion est de 66 % chez les 18 à 34 ans et de 57 % chez l'ensemble des adultes utilisant déjà des réseaux sociaux.

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