Par exemple, moi, je viens d’un milieu ouvrier, d’une famille immigrée et quand je suis arrivée à l’université, j’ai bénéficié d’une certaine reconnaissance dans mon entourage et auprès des collègues. Seulement, quand j’ai fait mon coming-out trans, ça a été la douche froide. C’est comme si tout ce que j’avais acquis ou fait ne comptait plus et qu’il fallait que je recommence à zéro. C’est un peu comme si d’un seul coup, les gens doutaient de mes capacités intellectuelles. Annoncer que l’on est une personne trans, c’est une sorte de déclassement. Pour les gens, être trans, c’est plus important que de tout le reste. J’ai le sentiment que malgré tout, on reste des curiosités, dans les médias comme ailleurs.
A l’occasion de la journée internationale de visibilité trans, l’AJL a rencontré Karine Espineira, chercheuse et autrice de plusieurs essais dont le dernier, “Transidentités et transitudes”, avec Maud-Yeuse Thomas, doit être réédité en poche dans les prochains mois. Un an après notre étude sur le traitement médiatique des transidentités, dans laquelle elle analysait la montée des rhétoriques antitrans, elle revient aujourd’hui sur la place accordée aux personnes trans dans les rédactions françaises.
Extrait choisie
Apolline de Malherbe sur BFMTV, recevait Jacqueline Eustache-Brinio [la sénatrice à l’origine du rapport LR sur les mineur·es trans], on voyait qu’elle n’adhérait pas aux thèses de la sénatrice, qu’elle souhaitait l’amener à en dire davantage sur les “transactivistes infiltrés”, mais elle n’avait pas toutes les cartes en main. Elle n’a pas pu argumenter quand Jacqueline Eustache-Brinio a dit que la Haute autorité de santé est infiltrée par “les transactivistes”. Ce qui est factuellement faux. Il s’agit de professionnel·les de la santé, qui sont aussi, pour certaines, trans. Donc voilà, on est face à des rédactions qui parlent de “neutralité journalistique” mais participent de la désinformation malgré elles, à cause d’un manque de travail.